25/06/2011

Arrangements.

Emile Vernaudon, père fatigué.
Il s’appelle Emile Vernaudon. Il habite à Tahiti, en Polynésie française. Il en a été élu député par deux fois, une fois en 1988 et l’autre en 1997. Apparemment, il en a bien profité, puisque la cour d’appel de Papeete (Tahiti) vient de le condamner à cinq ans de prison, et 83 000 euros d’amende pour complicité de détournement de fonds publics. On lui reproche d’avoir piqué, à son profit ou à celui de son parti, près d’un million d’euros dans la caisse de l’Office local des Postes et Telecom, dont il avait la tutelle. Son avocat a indiqué qu’il n’ira pas en cassation, mais qu’il demandera une libération conditionnelle en arguant, je cite, «de l’état de santé de son client et de sa récente paternité». M. Vernaudon a 67 ans. D’aucuns penseraient qu’une «récente paternité» à 67 ans témoigne plutôt d’une belle santé et d’une vigueur enviable, mais non. Sans doute que cette paternité l’aura fatigué, M. Vernaudon : les biberons en pleine nuit, les couches, tout ça… M. Vernaudon doit être ce qu'on appelle un nouveau père.    

Continuons dans les petits arrangements politiques : à Paris, comme on sait, le logement coûte cher. Très cher même. D’où les très nombreuses demandes de logement social, à loyers modérés, et les listes d’attente longues comme des jours sans pain qui en découlent. Et bien entendu, la volonté farouche de ceux qui ont bénéficié d’un tel logement, de s’y cramponner jusqu’à la mort et même après si possible. On vient de découvrir que c’est le cas de bon nombre de gens, aux revenus fort confortables par ailleurs. Des hommes et des femmes politiques. Ou des amis d’hommes et de femmes politiques. M. Chevènement, par exemple, touche plus de 7 000 euros par mois pour sa seule fonction de sénateur et occupe dans le Vème arrondissement un appartement de 120 m2 qu’il loue 1 271 euros/mois. Mme Batho, députée PS proche de Mme Royal, a moins de chance : son 110 m2 est situé dans l’humble XIXème et lui coûte 1 524 euros/mois. Mme Amara dispose d’un 50 m2 dans le XIIIème qu’elle paie 525 euros/mois. Bon, là, je cite plutôt des gens de gauche, mais il paraît que c’est une situation assez partagée. On se souvient peut-être que, en d’autres temps, de telles histoires sont venues troubler la quiétude de M. Juppé - alors Premier ministre - ou de M. Gaymard, éphémère ministre de l’économie et des Finances. Apparemment, les gouvernements s’en vont, les bonnes habitudes restent.

Arrangements toujours : vendredi dernier, cinq hauts fonctionnaires dont deux anciens directeurs de cabinet ministériel et un recteur d’académie ont dû s’expliquer devant la Cour des comptes. Pour des histoires d’emplois fictifs. A l’Education nationale. En gros, il existe dans l’EN un poste appelé «Inspecteur de l’Académie de Paris» qui a la double particularité de ne servir absolument à rien et d’être rémunéré entre 4 500 et 6 000 euros par mois. Du coup, ce poste intéressant sert (je cite la Cour des comptes) «à permettre des nominations de collaborateurs d’autorités politiques» afin de (je cite toujours la Cour des comptes) «garantir aux personnes ainsi nommées une rémunération pérenne, quels que soient l’endroit et la manière dont elles exerceraient par la suite leurs activités». En clair : de 4 500 à 6 000 euros qui vous tombent chaque mois dans la poche sans aucune contrepartie, à vie, et quels que soient par ailleurs votre activité et votre revenu. Parmi les heureux bénéficiaires du système, sont cités des membres de la direction du PS, une proche de M. Chirac, un proche de M. Sarkozy ou un ancien membre du cabinet de M. Darcos. Les cinq hauts fonctionnaires en question risquent des amendes. Ils ont le sentiment, paraît-il, qu’on leur fait «porter le chapeau». Voilà ce qu’on peut appeler des fonctionnaires lucides.

Et pendant qu’elle paie des «Inspecteurs» à ne rien faire et à vie, l’Education nationale vit des épisodes baroques. A Castillon-la-Bataille (Gironde) les collégiens doivent démontrer que, conformément au programme, ils ont appris au cours de leur scolarité à «nager dix mètres sur le ventre et sur le dos et à passer sous un objet flottant». Et comme la piscine de Castillon-la-Bataille est fermée depuis deux ans et qu’il n’y en a pas à proximité, le professeur du collège concerné fera passer l’épreuve sur gazon. Dans un parc. Avec des lignes dessinées sur le sol pour matérialiser les couloirs. Pour attirer l’attention des pouvoirs publics. De ce point de vue là, il semble avoir réussi. L’histoire ne dit pas si les collégiens devront vraiment se mettre en maillot.

Pendant que, faute d’eau, des professeurs inventent la natation sur herbe, le ministre de l’EN doit se dépêtrer d’une histoire de fuite. Pas de fuite d’eau, mais de fuite au Bac. Une question de l’énoncé de Maths ayant été diffusée sur Internet la veille de l’examen il a fallu décider. Annuler toute l’épreuve et faire replancher 160 000 élèves ? Annuler la question ? Répartir les points de la question sur les autres questions ? De toute façon, n’importe quelle décision, dans un sens ou dans l’autre, ferait des mécontents. M. Chatel a décidé d’annuler la question. Il a fait des mécontents. Qui ont décidé de porter plainte devant le tribunal administratif. Et de faire une pétition. Laquelle a déjà, paraît-il, recueilli plus de 15 000 signatures. L’argument de ces protestataires est que «certains élèves ont passé deux heures sur cette question» et que cette décision les pénalise. Deux heures, soit 50% du temps imparti pour l’ensemble de l’épreuve. Alors que la question rapportait quatre points sur vingt, soit 20% du total. C'est nul, comme rendement. Et on voudrait que des élèves capables d’un tel calcul décrochent leur bac S !

Le niveau monte.

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